Psaume 67 : quand Dieu nous offre son sourire

Prédication

Nous.

Les humains.

Les nations.

Les peuples.

Tous ensemble.

Tous, dans tous les recoins de la terre.

Si certaines pages de la Bible sont très intérieures, très personnelles, ce n’est assurément pas le cas de celle-ci. Ce n’est pas un individu, ni même un peuple qui sont concernés par la louange, mais tous les humains de la terre ! Le psaume 67 est l’un des plus universalistes. Il commence par l’annonce de la bénédiction de Dieu, il porte en son centre cette bénédiction, et il la réaffirme en terminant. Cette bénédiction, Dieu l’adresse à chaque être humain, à tous les êtres humains. Deux formulations qui disent une même réalité en mettant l’accent un peu différemment. Je répète culte après culte que la bénédiction est adressée à chacun.e personnellement, parce que c’est important : c’est en vivant de cette bénédiction reçue personnellement que chacun, chacune, peut constater sans peur ni jalousie que tous les autres humains reçoivent aussi cette bénédiction et qu’il peut être dit avec joie : « Dieu nous donne sa tendresse et nous bénit. Il nous comble de son sourire. », et non plus seulement Dieu me donne sa tendresse et me bénit et me comble de son sourire.

Le psaume commence par l’annonce d’un Dieu bénissant – et fait une pause. Un silence pour que la parole ait le temps de résonner. Une pause pour laisser le souffle pénétrer à nouveau dans les poumons. Il faut bien un silence, une respiration pour prendre la mesure de cela : « Dieu nous donne sa tendresse et nous bénit. Il nous comble de son sourire ». Toute la bonne nouvelle est là ! 6 mots en hébreu. 6 petits mots pour une immensité d’amour gratuit. Et un mot pour une pause. Toute ressemblance avec le poème de la création, ses 6 jours de création et son jour de pause, n’est peut-être pas fortuite… La Création est la première bénédiction. Et le poème de la Création est rythmé par le refrain « Dieu vit que cela était bon ». Autrement dit par une bénédiction.

(pause)

La suite du psaume raconte l’espérance de Dieu, celle qu’on trouve aussi dans les dernières pages de l’Apocalypse : que les humains le connaissent, le célèbrent, ensemble, qu’ils vivent dans la joie. « Les humains connaîtront tes desseins. Les nations sont à la fête. »

Connaître Dieu, ce n’est possible que dans la mesure où il se laisse connaître, et la manière dont il se laisse connaître c’est en bénissant : en disant du bien de nous, alors même que nous sommes douloureusement conscient.es parfois de ne pas mériter de telles paroles. Si Dieu bénit, ce n’est pas pour dénier ce qui ne va pas, ce n’est pas pour fermer les yeux sur les ténèbres qui nous habitent, c’est pour appeler la lumière à la vie, comme nous le raconte précisément le poème de la création. Une bénédiction qui voit la minuscule étincelle au milieu de l’océan de ténèbres, et l’alimente afin qu’elle devienne brasier chaleureux et lumineux. Une bénédiction qui voit même la possibilité ou l’espérance de cette étincelle, et la fait advenir au monde.

Il est difficile d’accepter de connaître Dieu comme celui qui appelle la lumière plutôt que comme celui qui maudit les ténèbres. Je trouve ici la traduction de Stan Rougier particulièrement parlante : « Dieu nous comble de son sourire ». Un sourire, pas un froncement de sourcils. L’hébreu dit littéralement : il fait luire sur nous ses faces. Ce sont les mêmes mots qu’on trouve dans la bénédiction du livre des Nombres et qu’on traduit souvent par « Dieu fait rayonner sur nous sa lumière ou son visage ». Bien sûr Rougier s’éloigne du sens littéral en parlant de sourire, et laisse de côté l’image de la lumière. Traduire, c’est choisir, et d’une certaine manière trahir. Mais Rougier ne trahit pas en apportant l’image du sourire, il approfondit : le Dieu qui dit du bien de nous et nous enveloppe de sa lumière n’est pas un Dieu bougon, fâché, à la mine sévère.

Ce Dieu qui sourit, c’est celui qui attend et espère chaque être humain, qui l’accueille avec amour et bienveillance. Ce qui n’empêche aucunement le fait d’être juste ni celui d’être un guide. Et c’est le Dieu dont nous pouvons nous réjouir, celui qui suscite en nous le rire du soulagement, la joie du salut ! Au vu de ce que nous savons de nous-mêmes, nous attendons un visage sévère, sourcils froncés, yeux levés au ciel devant la masse de nos erreurs. C’est un sourire qui nous accueille. Nous attendons une parole de condamnation et une peine à accomplir. C’est une bénédiction qui nous relève et nous envoie pour aimer et bénir à notre tour.

Ce salut personnel nous oblige : au bénéfice de la bénédiction et du sourire de Dieu, je suis tournée vers les autres, pour les bénir et leur sourire. Pour être pour elles, pour eux, bénédiction et sourire de la part de Dieu. Pour me réjouir avec eux, avec elles, d’être béni.es ensemble, d’être appelé.es à la vie ensemble, d’être guidé.es sur les sentiers de la justice ensemble. Inversement, être témoins de la bénédiction et du sourire de Dieu pour d’autres, m’invite à prendre conscience que moi aussi je suis bénie. Quelle découverte ! Et alors oui, ensemble, tous ensemble, nous pouvons dire notre joie, célébrer Dieu. Ou plutôt nous pourrions le faire. Et nous le ferons. Car la joie est déjà là, un tout petit peu, ou juste par moments, et elle est aussi encore à venir. Nous sommes en train d’apprendre à connaître Dieu, à lui faire confiance, à le célébrer. Comme lui est en train de nous bénir.

Le psaume commence avec la bénédiction de Dieu, il porte en son cœur la bénédiction de Dieu, et il se termine par la bénédiction de Dieu et la joie qui monte de toute la terre. La bénédiction est déjà là. La joie est encore en espérance. A nous, à notre mesure et là où nous sommes, de participer au jaillissement de cette joie tant espérée par Dieu, celle qu’il a formée comme projet de vie pour nous comme pour tous les humains de la terre.

Une joie qui s’exprime d’abord dans le fait de vivre chaque jour un peu plus comme au bénéfice de la tendresse et de la bénédiction de Dieu.

Dieu nous donne sa tendresse et nous bénit. Il nous comble de son sourire. Pause.

À lire aussi

Prédication précédente :

Aimer, ça veut dire quoi ?

Mercredi, nous avons travaillé avec les jeunes du cycle l’un des commandements les plus difficiles de Jésus : « vous avez entendu qu’il vous a été dit : tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi. Mais moi je vous dis, aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent, et priez pour ce...

Prédication suivante :

« Que la lumière soit ! »

« Vous êtes bien courageux de lire le journal de bon matin en ces temps si durs ! » disait une femme à son voisin dans le tram l’autre jour. Et c’est vrai que les conflits éclatent partout, toujours plus durs et plus violents, que la misère et la détresse touchent de plus en plus d’hommes, de femmes...

Voir toutes les prédications